Ouverture du concert de l’Académie Jaroussky

Jeudi 8 décembre

Galerie des Fêtes
Seul le prononcé fait foi

Madame la ministre de la Culture, chère Rima Abdulmalak, 

Monsieur le ministre de l’Éducation nationale, cher Pap Ndiaye,

Mesdames et messieurs les membres du Bureau,

Mesdames et messieurs les députés, chers collègues,

Mesdames, messieurs,

Étymologiquement, la musique est tout ce qui nous vient des Muses, ces divinités grecques de l’inspiration artistique. Et les Muses ont été à l’honneur depuis le début de cette législature, dans cette Assemblée nationale dont j’ai souhaité ouvrir en grand les portes.

Dès le début de la session, durant la Nuit blanche, une sculpture de Prune Nourry est apparue dans la Cour d’honneur du Palais-Bourbon, tandis que des badges artistes ont permis aux dessinateurs d’investir l’hémicycle pour y croquer les députés, durant les questions au Gouvernement.

Puis ce fut, avec la Nuit du droit, une représentation théâtrale sur « ces femmes qui ont réveillé la France ». Et hier encore, dans l’hémicycle, au milieu de trois cents lycéens, des comédiens ont pu reconstituer les grands débats de 1905 sur la laïcité, sous la direction de Catherine Salviat, sociétaire honoraire de la Comédie-Française.

Cette politique d’ouverture ne se limite d’ailleurs pas aux artistes. Dans cette belle galerie des Fêtes nous avons accueilli un congrès international d’historiens, puis lancé l’Assemblée des Idées : un rendez-vous régulier permettant des échanges directs entre simples citoyens, experts d’une problématique et députés. Nous avons commencé par le thème crucial du logement et la prochaine assemblée des idées, dans le contexte que vous connaissez, portera sur les relations internationales et en particulier sur la place de la France dans le monde.

Vous le voyez, des plasticiens aux diplomates, tout ce que notre pays compte de talents est bienvenu à l’Assemblée nationale ; et, dans cette perspective, les musiciens ont toute leur place en ces lieux.

C’est Montesquieu, dans L’Esprit des lois, qui lança cette idée que la musique adoucit les mœurs… C’est vous dire si nous avons besoin d’elle en politique.

Quand il a voulu représenter la civilisation, au plafond de la bibliothèque du Palais-Bourbon, Delacroix a peint Orphée enseignant la musique et la poésie aux Grecs. Face à lui, de l’ordre côté de la nef remplie de livres, c’est Attila suivi de ses hordes barbares qui foulent les lettres et les arts… Entre les deux, pour nous démocrates et républicains, le choix est vite fait.

Oui, la musique est outil de civilisation : elle éduque, elle épanouit, elle émancipe et nous savons bien que tous les régimes dictatoriaux se méfient de la musique et des musiciens, autant que de leur liberté. La musique symphonique, en ce qu’elle produit une mélodie par la diversité des accords et des instruments, est pour moi une métaphore de la démocratie.

On compare souvent, d’ailleurs, la présidence de l’Assemblée nationale au travail du chef d’orchestre. Il y a pourtant une différence de taille : dans l’hémicycle, tous les instrumentistes ne suivent pas la même partition, ce qui peut donner parfois un résultat quelque peu cacophonique… Mais nous sommes aussi capables parfois d’une belle harmonie. C’est pour lui faire écho que j’ai invité à se produire ici l’Académie Jaroussky, qui mêlent si magistralement musique et réalisation de l’égalité républicaine.

Fondée en 2017 par Philippe Jaroussky, cette académie est en résidence à la Seine musicale. Son programme « Jeunes Apprentis » accueille chaque année 25 enfants de 7 à 12 ans, issus de familles connaissant des difficultés financières ou sociales qui pourraient limiter leur accès à la musique.

Piano, violon ou violoncelle, l’instrument et le matériel sont prêtés aux familles. Après trois ans d’apprentissage, les enfants qui le souhaitent sont encouragés à prolonger leur formation musicale grâce à des passerelles avec des conservatoires et des écoles de musique. Chaque apprenti est parrainé par un Jeune Talent et l’Académie propose en outre, aux élèves ainsi qu’à leurs familles, des concerts et des visites de musées. C’est là un magnifique engagement, qui mérite d’être salué.

J’évoquerai aussi le programme « Jeunes Talents », tout aussi exemplaire : il concerne 25 jeunes de 18 à 30 ans, issus de formations d’excellence en chant, piano, violon ou violoncelle, qui bénéficient d’une année de soutien. 

Un si beau projet ne peut provenir que d’une expérience humaine : celle de Philippe Jaroussky lui-même, dont les parents n’étaient pas musiciens, et qui, à l’âge de 11 ans, a eu la chance d’être initié à la musique grâce aux bons conseils d’un de ses professeurs de Sartrouville – dans une circonscription que je connais bien… Sans ce professeur qui a détecté et cultivé ses talents, et sans ses parents qui l’ont soutenu, Philippe Jaroussky ne serait jamais devenu ce musicien reconnu que nous connaissons tous.

La raison d’être de ce concert, c’est d’abord de rendre hommage à l’Académie Jaroussky, dont le travail et le message sont essentiels pour notre promesse républicaine. Trop souvent vue comme un attribut des élites, la musique classique devient grâce à elle le bien de tous. Tout le monde peut être bouleversé par elle, pourvu d’avoir été initié à cet art. 

Par la complexité de ses compositions, la musique classique nous apprend beaucoup sur nous-mêmes et sur les autres. Donner aux enfants issus des milieux modestes l’opportunité de s’initier à la musique classique, c’est une chance pour notre République.

Ce soir, nous accueillons aussi dans le public de nombreux jeunes, conviés ici par l’intermédiaire du Pass Culture : là encore, la démocratisation culturelle devient réalité et je m’en réjouis, car les grandes œuvres appartiennent à tous.

Comme Philippe Jaroussky, tendons la main à nos jeunes et partageons l’accès à la culture. 

C’est tout le sens de cette soirée à laquelle je vous remercie d’être présents et je mets fin à ce prologue pour dire enfin : musique !

Je vous remercie.

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