Lundi 3 juin 2024
Discours
Discours
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Lundi 19 juin
Hémicycle de l'Assemblée nationale
Candidat en juin 1968, sous les couleurs du PSU, Michel Rocard est battu. Sa profession de foi est alors très revendicative :
Le mouvement de Mai 68 a clairement montré par son ampleur que la jeunesse du pays et les travailleurs ne voulaient plus d’un pouvoir soumis aux forces capitalistes.
Grâce à ce mouvement, la classe ouvrière a souvent obtenu des avantages matériels, vainement réclamés depuis des années et ne faisant d’ailleurs que compenser tardivement les résultats de la politique rétrograde du gaullisme. Mais déjà l’État et le patronat s’apprêtent à reprendre par le jeu de l’inflation ce qu’ils ont dû céder aux travailleurs.
Les revendications matérielles des travailleurs ne seront réellement garanties, leur exigence de pouvoir ne sera satisfaite, que par un Gouvernement de transition vers le socialisme, appuyé sur l’ensemble des forces populaires pour les objectifs suivants :
Mettre l’économie au service des travailleurs ; transformer l’Université ; assurer la liberté de l’information ; lutter contre l’impérialisme ; préparer avec des comités populaires à tous les échelons les institutions d’une société socialiste et démocratique.
Vingt ans plus tard, vient le temps des responsabilités. Dans sa déclaration de politique générale, le 29 juin 1988, Michel Rocard présente sa conception de l’action gouvernementale :
Aucune formation ne détient la majorité absolue dans cette Assemblée. Les socialistes dont j’ai la fierté d’être y sont majoritaires mais de manière seulement relative. Ainsi en ont décidé les Français.
Notre tâche, dès lors, n’est pas simplement de nous en accommoder, d’essayer tant bien que mal de rassembler des voix au hasard des projets.
Les Français ont exprimé ce qu’ils voulaient, leur volonté est notre loi et j’entends l’appliquer.
Cela signifie en premier lieu que la politique conduite sera conforme aux valeurs qui font les socialistes. La tolérance, la justice, le progrès, la solidarité.
Tous mes amis qui siègent sur ces bancs y sont acquis. Mais ils savent aussi que les idées qu’ils défendent ne sont jamais si belles, si rayonnantes, que quand elles valent pour tous. Nos priorités ne sont pas celles d’une moitié de la France contre l’autre moitié, mais celles de tous les Français. Défaire ce que les autres ont fait, faire ce que d’autres déferont, voilà bien le type de politique dont les électeurs ne veulent plus.
Nous ne demanderons à personne de nous rejoindre par intérêt ni de trahir ses convictions. Tous les socialistes qui sont ici entendent bien le rester. Et nous comprenons donc que d’autres, qui sont centristes, communistes, libéraux ou gaullistes n’envisagent pas non plus de renoncer à l’être.
Mais avec ceux qui sauront être ouverts, nos différences s’accorderont, sans que nul n’ait besoin de renoncer à ce qu’il est. C’est là ce que veulent les Français et c’est à leur égard que chacun devra donc prendre ses responsabilités.
J’ai pris les miennes dans le règlement du dossier néo-calédonien : en me refusant à toute polémique partisane à l’égard de mes prédécesseurs, en informant et associant ceux des responsables politiques de l’opposition qui l’ont bien voulu.
À convictions anciennes, fidélité maintenue. Mais à temps nouveaux, pratiques résolument nouvelles. […]
Mesdames et messieurs, je me suis, dans cette déclaration, soigneusement abstenu de toute mise en cause, de toute dénonciation. Rien ne serait plus contraire à la passion de la France unie que nous fait partager François Mitterrand. Rien enfin ne serait moins conforme aux besoins des Français.
En tant que responsable, mon propos est sans doute austère. En tant que citoyen et tout simplement en tant qu’homme, mon enthousiasme est entier, mon espoir est intact.
Je rêve d’un pays où l’on se parle à nouveau. Je rêve de villes où les tensions soient moindres. Je rêve d’une politique où l’on soit attentif à ce qui est dit, plutôt qu’à qui le dit. Je rêve tout simplement d’un pays ambitieux dont tous les habitants redécouvrent le sens du dialogue, – pourquoi pas de la fête, – et de la liberté.
Je suis de ceux qui croient, au plus profond d’eux-mêmes, que la liberté, c’est toujours la liberté de celui qui pense autrement.
Chérir la liberté de cette manière-là, c’est, autour des thèmes que je vous ai proposés, la réconciliation, la solidarité, les chemins de l’avenir, construire un nouvel espoir pour que vivent les Français et pour que vive la France.
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